12 juin 2023

Que faut-il savoir des chenilles processionnaires du pin et du chêne ?

Nuisibles, les chenilles processionnaires du chêne et du pin prolifèrent au point de menacer la santé humaine, voire même la flore.

Que faut-il savoir des chenilles processionnaires du pin et du chêne ?

Les chenilles processionnaires du pin et les chenilles processionnaires du chêne ont beaucoup de points communs. Ces insectes qui se déplacent en longues files indiennes, se nourrissent des feuilles des chênes ou des aiguilles des pins qu’elles affaiblissent sans toutefois les tuer. Leurs poils urticants peuvent être très dangereux pour les humains et les animaux domestiques, notamment les chiens. Que faut-il savoir de ces petites bêtes et comment lutter contre leur prolifération ?

Thaumetopoea pityocampa et Thaumetopoea processionea sont sur un arbre

Dégâts occasionnés par la chenille processionnaire du pin

Qu’elles soient processionnaires du chêne ou processionnaires du pin, elles vivent en colonie sur l’essence d’arbre qui les nourrit et se déplacent de nuit en file indienne, d’où leur surnom. La processionnaire du pin, qui est tout de même un drôle d’animal, mange les aiguilles, ce qui affaiblit naturellement les arbres, qui sont alors sujet à d’autres attaques parasitaires. Elle s’attaque particulièrement au pin parasol, au pin d’Alep, au pin blanc, au pin noir d’Autriche, au pin maritime, au pin sylvestre, au pin laricio. Puisque chez cet effroyable prédateur nécessité fait loi, la chenille, en son innombrable multitude, croque aussi allégrement les aiguilles de sapin ou de cèdre de l’Himalaya, si l’un de ses pins préférés vient à manquer ou qu’elle a déjà digéré l’essentiel de sa parure. 

Dégâts causés par la chenille processionnaire du chêne

La cousine, Thaumetopoea processionea, n’est pas plus sobre mais peut nous paraître un peu plus raffinée, se nourrissant des feuilles tendres du chêne, qu'il soit sessile, pédonculé ou pubescent dès que celles-ci sont déployées. Les oeufs des chenilles éclosent assez tôt au printemps, avant même le débourrement des bourgeons, mais, malignes, les petites bêtes attendent l’apparition des premières feuilles pour se nourrir. Pendant ce temps, on dit qu’elles restent en quiescence. En revanche, le festin qui s’ensuit est à la hauteur du jeûne qui l’a précédé. Les chenilles attendent la nuit pour agir, elles sortent précipitamment du cocon où elles ont trouvé abri toute la journée, et c’est une véritable procession de chenilles qui dévore les feuilles, laissant derrière elles un réseau de fils pour signer leur méfait.

Les chenilles processionnaires représentent un danger

Quels sont les dangers des chenilles processionnaires pour les arbres ?

Pour ce qui concerne les arbres, selon l’essence et le type de peuplement, l’intensité des dégâts provoqués par les chenilles est variable. Dans les peuplements fermés de plaine, elles colonisent essentiellement les lisières, principalement celles qui ont une orientation sud/sud-ouest, occasionnant des dégâts tout à fait limités. La processionnaire du pinthaumetopoea pityocampa se nourrit des aiguilles mais même une défoliation totale ne provoque par la mort des espèces de pins attaquées. 
Elle entraîne tout de même une perte de production de bois équivalant à une année d’accroissement si la défoliation a été totale. En quelques années, les arbres sont capables de reprendre du poil de la bête et de poursuivre leur croissance normalement, si les conditions sanitaires sont bonnes. Car tel est le principal danger que fait courir à l’arbre une attaque de processionnaires : que d’autres maladies ou parasites s’installent et tirent profit de l’affaiblissement de l’arbre. Des attaques de scolytes ou de pissodes succédant à une invasion de chenilles processionnaires peuvent avoir raison de certains arbres, quoique ce phénomène reste rare. 

Quels sont les dangers des chenilles processionnaires pour les êtres humains et les bêtes ?

En revanche, les risques sanitaires pour les hommes et les animaux sont assez sévères. Recouvertes de poils urticaires, les chenilles processionnaires sont capables de libérer dans l’air, en cas de menace, cette parure perverse, très facilement emportée par le vent. Ainsi peut-on être atteint par les poils urticants sans même avoir touché la moindre chenille. Et lorsque le poil se brise, il libère immédiatement la substance allergisante qu’il renferme : la thaumétopoéïne. Celle-ci provoque de très vives démangeaisons caractérisées par des érythèmes ou des éruptions prurigineux, parfois accompagnés d'atteintes oculaires ou pulmonaires voire des réactions allergiques plus graves comme des oedèmes de Quincke ou des chocs anaphylactiques.
Il faut absolument éviter de manipuler les nids de ces chenilles dans lesquels peuvent demeurer de nombreux poils urticants pendant plusieurs années. 
Les animaux peuvent aussi être attaqués par les poils microscopiques de ces vilaines bestioles et, sans soin, il arrive que leurs langues se nécrosent et finissent en partie amputées. 

Où trouve-t-on des chenilles processionnaires en France ?

Cet insecte, qui a intégré la liste des organismes nuisibles en avril 2022, a colonisé l'ensemble de la France métropolitaine en un demi-siècle. Aujourd'hui, tous les départements de France sont soumis soit à la processionnaire du chêne, soit à la processionnaire du pin. La chenille processionnaire du pin s’est d’abord implantée dans les forêts de conifères des régions atlantique et méditerranéenne. Les hivers de moins en moins rigoureux lui ont permis de coloniser tout le territoire, à l'exception de quelques déparements septentrionaux. Les températures hivernales douces, aussi bien en latitude qu’en altitude, favorisent en effet l’éclosion des œufs et la croissance des larves. La pullulation de ces organismes nuisibles est ainsi favorisée par le réchauffement climatique. Présente sur 1% du territoire francilien au début des années 2000, elle est désormais durablement installée sur un peu plus de 80% de l’Ile-de-France. A ce rythme, estime l'Agence Régionale de Santé, l’ensemble de l’Ile-de-France sera probablement colonisé d’ici 5 ans.
Quant aux pullulations périodiques de chenilles processionnaires du chêne, elles sont essentiellement présentes dans les chênaies du nord-ouest, de l’Île-de-France et d’une zone d’endémie à l’Est. Ces chenilles se développent, de manière discrète, sur une bonne partie de la France, sauf dans certains départements de la moitié sud. Leur aire de répartition n’a pas beaucoup changé ces dernières décennies, mais l’espèce pullule de plus en plus.

Notre forêt de Pézarches est affectée par la processionnaire du chêne

C'est ainsi que nous avons été obligés d'interdire l'accès à notre forêt de Pézarches, en Seine-et-Marne et d'annuler toutes les sorties que nous y avions organisé, au printemps 2023. Car la chenille processionnaire du chêne y pullule et que son potentiel de nuisance atteint son optimum entre avril et août, avec un pic en juin. Nos forestiers eux-mêmes ne s'y aventurent plus, car il suffit d'y pénétrer pour subir l'effet urticant des chenilles. Hélas, faut-il dire, nous ne sommes pas les seuls à la subir. En Île-de-France, l'ONF reconnaît avoir également de grandes difficultés à s'en affranchir. Nous avons confié à notre apiculteur partenaire, Olivier Girbal, le soin de s'occuper de traiter les chenilles processionnaires du chêne, tâche dont il s'acquitte déjà pour d'autres propriétaires forestiers. 

Chenilles processionnaires du chêne à Pézarches

La lutte biologique contre les chenilles processionnaires

Même s’il faut apprendre à vivre avec les colonies de processionnaires qui étendent constamment leur aire de répartition, il est nécessaire de freiner leur trop forte expansion. Des méthodes de lutte respectueuses de l’environnement existent, parmi lesquelles la lutte mécanique appelée l’échenillage, qui revient à couper les nids et brûler les cocons. C’est toutefois une action sensible à mettre en place, non seulement pour ne pas se blesser en manipulant des nids potentiellement infectants mais également pour éviter tout incendie involontaire
Une autre méthode est le piégeage, qui consiste à mettre en place des pièges à phéromone pour capturer les papillons mâles. L’installation de nichoirs à mésanges commence également à se développer, puisque la mésange est un des prédateurs naturels de cet horrible olibrius qui peut faire perdre sa langue à un chien ou un cheval mais semble faire les délices de certains oiseaux comme le coucou, la huppe fasciée, certaines chauves-souris et les mésanges donc.
Il existe également un traitement biologique, avec Bacillus Thurengiensis ssp. kurstaki (Btk), une bactérie qui vit naturellement dans le sol. Depuis une trentaine d'années, elle est utilisée un peu partout dans le monde comme agent de lutte biologique pour réprimer les populations de divers insectes ravageurs forestiers et agricoles. Le Btk agit lorsqu'il est ingéré par la chenille car la substance toxique, la protoxine, est enfermée dans un cristal qui sera détruit par les sucs digestifs. Une fois libérée, elle empêche la chenille de s'alimenter, ce qui la fait mourir en quelques jours. Dans la forêt de Pézarches, le Btk sera pulvérisé depuis le sol par notre apiculteur partenaire Olivier Girbal, dont la deuxième casquette est la lutte contre les nuisibles (chenilles processionnaires, frelons asiatiques...).

Ce bacille est sans danger pour les animaux, les auxiliaires, les insectes pollinisateurs, les organismes aquatiques, les poissons, les végétaux et les hommes. Dans un deuxième temps, nous installerons des pièges à phéromones pour capturer les papillons mâles et les empêcher de se reproduire. Toutes ces mesures visent à abaisser la pression qu'exercent ces nuisibles sur les chênes. 
 

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