28 oct. 2019
Espèces invasives : le coût est énorme !
Les espèces exotiques envahissantes coûtent des centaines de milliards d’euros chaque année et mettent en danger la biodiversité.
Sous toutes leurs formes, les espèces exotiques envahissantes, que l’on appelle aussi invasives, coûtent des centaines de milliards d’euros chaque année et mettent en danger la biodiversité. Une équipe française a mis au point un outil de profilage, afin de les arrêter aux frontières. Ce qui ne résout que partiellement le problème.
Qu'est-ce qu'une espèce exotique envahissante ?
Pour classer une espèce animale ou végétale parmi les espèces exotiques envahissantes, on s’appuie sur quatre critères, qui sont : l’origine de l’espèce ; sa capacité à se reproduire dans un milieu naturel ; sa dispersion géographique et son impact environnemental. Si la plupart des espèces exotiques ne persistent que par de petites populations isolées, il arrive que certaines nuisent à l’environnement dans lequel elles ont pris place. Les populations croissent alors, parfois très rapidement, comme dans le cas du frelon asiatique ou des chenilles processionnaires du chêne et du pin, se répandent et entrent en compétition avec les espèces indigènes, mettant en péril l’écosystème qui avait prévalu jusqu’alors, et qui s’était formé sur un cycle long.
Le phénomène des espèces invasives s’accélère
Le phénomène des espèces exotiques envahissantes a pris une ampleur sans précédent, au cours des cinquante dernières années. Celui-ci a cru à la faveur de l'augmentation massive des échanges internationaux et du changement climatique. C’est ainsi que le premier rapport d'évaluation mondiale sur la biodiversité publié le 6 mai 2019 par l'IPBES (l'Instance scientifique et politique mondiale chargée de fournir aux décideurs les meilleurs éléments probants disponibles concernant la nature, à l'instar du GIEC pour le climat), les espèces exotiques envahissantes « ont augmenté d'environ 70 % depuis 1970 dans les 21 pays qui ont présenté des données détaillées ». Ces invasions se multiplient, entraînant des dégâts colossaux sur les plans écologique, sanitaire et économique.
Les espèces exotiques sont un grand danger pour la biodiversité
Les scientifiques estiment que les espèces exotiques envahissantes constituent la deuxième cause actuelle d'extinction des espèces, après la dégradation et la destruction des habitats naturels. Elles représentent également la deuxième plus forte menace sur le devenir de la biodiversité terrestre. Quant au coût économique, il est pharaonique, selon les premières estimations de l’équipe de Franck Courchamp, du laboratoire Ecologie, Systématique & Evolution, dont le résultat devrait bientôt paraître dans la revue Nature. Pour les seuls insectes, il serait déjà question de plus de 70 milliards d’euros par an…
Quelles sont les espèces exotiques invasives ?
Parmi la longue liste d’espèces de plantes invasives, nous pouvons citer le mimosa des fleuristes (Acacia dealbata), qui est originaire d’Australie et de Nouvelle-Zélande, et considéré comme invasif en Europe, en Afrique du Sud, au Chili, en Californie, en Inde et à Madagascar. Cet arbre entre en compétition avec la végétation indigène et modifie notamment l’hydrologie. En résulte une diminution de la production forestière, et l’arbre peut en outre provoquer des allergies.
L’ailante glanduleux (Alianthus altissima), originaire de la Chine, est considéré comme invasif en Europe, en Afrique, aux Etats-Unis, en Amérique du Sud, en Australie. Il entre en compétition avec la végétation indigène, causant des effets allélopathiques. Il peut en outre provoquer des dermatites et des myocardites.
Quelles sont les solutions face aux espèces envahissantes ?
Alors que les enjeux sont considérables, en matière d’écologie, d’économie et de santé publique, les pouvoir publics sont un peu dépassés, c'est pourquoi l'INPBES tire la sonnette d'alarme, notamment à l'occasion de la COP 15 de la biodiversité. Ils ne prennent en tout cas pas, pour l'instant, les moyens qu’il faudrait pour endiguer ce phénomène et le combattre. En Europe, seulement une cinquantaine d’espèces est interdite, alors que la liste devrait en répertorier plusieurs centaines, voire plusieurs milliers. Une fois l’espèce envahissante installée, il est très difficile de s’en débarrasser, c’est pourquoi il faut l’empêcher de passer la frontière. Pour cela, il faut d’abord l’identifier. C’est tout le travail de « profilage » qu’a réalisé l’équipe de l’écologue Franck Courchamp du laboratoire Ecologie, Systématique & Evolution.
A défaut de pouvoir effectuer un retour en arrière, nous pouvons toujours empêcher les espèces envahissantes de propager leur nocivité sous nos contrées.
Quelles sont les espèces exotiques envahissantes de nos forêts ?
En dépit d'une sylviculture durable, nos forêts ne sont pas épargnées par les espèces exotiques envahissantes. Les frelons asiatiques attaquent régulièrement les ruches que nous avons installées et, comme espèce exotique envahissante, ne souffrent à peu près nul prédateur pour réduire leur population. C'est pourquoi nous sommes contraints d'installer des pièges et de protéger nos ruchers. Dans la forêt de Launay Guen, nous déplorons la présence de laurier palme, une espèce très envahissante, d'abord importée comme plante d'ornement, et qui s'est rapidement répandue en Europe. Dans la forêt de Luthenay, la présence d'ambroisie est décelée, tandis qu'à Pleyben, c'est contre une invasion de bambou que nous luttons.
La première étape est l'identification de ces espèces exotiques envahissantes dans ou aux abords de nos forêts. Celle-ci se fait lors des diagnostics réalisés par les forestiers ou les écologues. Viennent ensuite les actions à mettre en place. Ces actions trouvent leur source de financement auprès de nos clients, car elles peuvent être longues et coûteuses. En effet, luttter contre une espèce envahissante est une lutte au long cours que l'on n'est jamais certain de remporter définitivement. Pour ce qui est des plantes, des lianes ou des arbres invasifs, il convient de les arracher jusqu'à la racine puis de les enfouir dans des fosses, à plusieurs mètres de profodeur et de les recouvrir de chaux. Certaines montrent même une résistance surprenante à ces traitements. Ensuite, nous réalisons un inventaire pour nous assurer qu'elles ne se réinstallent pas. Et en cas de reprise subite, l'intervention doit être immédiate. En l'occurrence, il vaut donc mieux prévenir que guérir, mais les échanges internationaux constants sont un danger qu'il est impossible de contrôler tout à fait. La Corse a toutefois mis en place une législation drastique qui interdit tout transport de plantes depuis le continent sur l'île. Cela permet de contenir les risques.