24 avr. 2020
Déconfinement : éviter une hausse des émissions de gaz à effet de serre
Le confinement a eu un effet bénéfique sur les émissions de Gaz à Effet de Serre qui sont en baisse, mais il ne faut pas qu’elles repartent à la hausse dès le déconfineme
Les climatologues nous mettent en garde depuis plusieurs semaines. Certes, le confinement que nous impose la pandémie de Covid-19 a eu un effet bénéfique sur les émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) qui sont en nette baisse, mais pour que cela ait un impact sur le réchauffement climatique, il ne faut pas qu’elles repartent à la hausse dès le déconfinement. Or, plusieurs indicateurs montrent que nous nous dirigeons vers une reprise économique qui pourrait annuler tout le gain accumulé au cours du confinement. C’est un scénario qu’il faut à tout prix éviter.
Confinement : des émissions de GES en nette baisse
30%, c’est le chiffre globalement retenu par les observateurs et les experts climatiques. En Chine, la pollution au dioxyde de carbone (CO2) aurait baissé de 30% ces dernières semaines. Il en est de même en France, ce qui pourrait donner, sur toute l’année, un recul de l’ordre de 5 à 15% des émissions de CO2. L’Accord de Paris sur le climat visant une baisse annuelle de 7% des émissions mondiales, nous serions dans les clous. Nous serions même sans doute au-delà, si l’on tient compte du chiffre de 25% de baisse des émissions mondiales de gaz à effet de serre. C’est du jamais-vu, mais encore faut-il que cela dure. Comme le rappelait il y a quelque temps la paléoclimatologue et co-présidente du Giec Valérie Masson-Delmotte, “il faut que les émissions mondiales de CO2 diminuent régulièrement et fortement pendant des décennies” pour stopper le réchauffement climatique. Or, on s’attend malheureusement à un fort rebond d’émissions de GES à la suite du déconfinement.
Déconfinement : la crainte d’un effet boomerang
La pollution, et par conséquent la hausse du réchauffement climatique, nous reviendront-elles en plein visage comme un boomerang, alors que nous nous serons congratulés d’avoir fait baisser nos émissions de GES pendant plusieurs mois ? C’est le scénario que craignent de nombreux scientifiques et spécialistes. François Gemenne, chercheur et membre du Giec le dit ainsi : “L’Histoire nous apprend qu’il y a toujours un rebond de la pollution et des émissions de gaz à effet de serre après les crises : les plans de relance économique ont tendance à vouloir relancer la machine, c’est-à-dire une économie essentiellement fondée sur l’extraction des énergies fossiles.” De son côté, le Haut Conseil pour le Climat (HCC) craint également qu’un effet rebond accompagne la reprise de l’activité économique. C’est inévitable, se dit-on. Tout au moins, si l’on ne s’efforce pas de changer notre regard et que les gouvernements ne mettent pas tout en place pour que la reprise s’accompagne d’une douceur écologique. Lors de la crise financière de 2008, une baisse des émissions de GES avait également été observée, et l’on s’était réjoui de cette forme de répit donné à la planète. On reprenait sa respiration. Et puis, dès 2010, lorsque l’économie est repartie, les taux d’émissions de GES ont dépassé ceux des années qui précédèrent la crise.
Nous pourrions croire avoir évolué en dix ans, mais les mesures actuelles des grandes nations laissent hélas peu d’espoir. Les Etats-Unis viennent de décider de suspendre l’application des lois environnementales pour relancer l’économie. Et certains pays européens semblent prêts à remettre en cause le Green New Deal Européen pour relancer leur machine économique. En refusant de voir que la crise économique que nous traversons est intrinsèquement liée à la crise écologique mondiale.
L’écologie doit conditionner l’économie
Nous avons trop fait de l’écologie la variable d’ajustement de l’économie. Or, il est une constante qu’un jeune enfant peut comprendre, et que les enfants admettent d’ailleurs mieux que nous : si la Terre est malade, nous en pâtirons tous. Autrement dit, l’écologie passe avant l’économie, car nous avons beau avoir les poches pleines d’argent, tout l’or du monde ne vaut rien si les fruits ne poussent plus, si les arbres ne fleurissent plus, si la Terre est asphyxiée. Evidemment, cela peut sembler alarmiste, mais les chiffres sont tenaces et les faits sont têtus, l’atmosphère terrestre se réchauffe inexorablement, du fait de l’accumulation du CO2, le niveau des eaux monte, le nombre de catastrophes naturelles se multiplie. Si nous ne changeons pas radicalement, nous préparons le terrain à une nouvelle catastrophe économique dans dix ans, qui sera sans doute une nouvelle fois provoquée par une crise sanitaire, une épidémie ou une catastrophe écologique.
La loi énergie-climat a fixé un cadre auquel nous devons nous tenir. C’est-à-dire qu’il convient de réduire les émissions de CO2 de nos logements, de réduire l’impact carbone de nos véhicules, de réduire le trafic aérien mondial et d’investir massivement dans des projets à bas carbone. Cela revient à contribuer réellement à l’écologie, au développement durable et à l’enrichissement de la biodiversité, non pas à céder à la tentation du greenwashing. Lequel, du reste, fait de moins en moins recette, et c’est tant mieux.