21 nov. 2022
Loi Agec et industrie textile : l’opportunité d’une révolution écologique
La loi antigaspillage offre une opportunité à l’industrie textile française de relocaliser une partie de sa production et de réduire son impact environnemental.
Responsable de 10% des émissions de gaz à effet de serre (GES) mondiaux, l’industrie du textile contribue significativement au réchauffement climatique. Avec l’entrée en vigueur de la loi Agec au 1er janvier 2023, une opportunité est donnée au secteur du textile français de rapatrier une partie de sa production pour réduire son impact carbone et permettre aux consommateurs de faire des achats plus responsables. Nombre d’entreprises se réjouit d’ores et déjà de l’instauration de cette loi qui privilégiera le "fabriqué en France” et poussera un secteur de première importance à prendre véritablement en compte son empreinte écologique.
Et si la loi Agec était une merveilleuse opportunité pour tout un secteur de relancer l’emploi et son industrie de manière beaucoup plus vertueuse ?
Quelle est la part du secteur textile dans les émissions de GES ?
Si depuis les années 1990, la France peut se targuer d’avoir significativement réduit ses émissions intérieures de GES, il convient de se méfier des données brutes. En effet, le phénomène de désindustrialisation massif est en partie la cause de la baisse des émissions de GES intérieures. Car dans le même temps, les émissions extérieures de la France ont augmenté, et la balance commerciale a évolué en notre défaveur. France Industrie note ainsi en synthèse et analyse de l’étude Citeo de 2020 que “chaque fois que nous baissons nos émissions de CO2 de 10 millions de tonnes, nous provoquons un déficit supplémentaire de 5 milliards d’euros !” Cela s’explique par le fait que nos importations de produits textiles augmentent à la mesure de notre désindustrialisation. Par conséquent, nous achetons plus que nous vendons et notre balance commerciale devient déficitaire. De même, France Industrie relève que, si nos émissions de CO2 ont baissé de 20% entre 2005 et 2015, “le principal contributeur de cette baisse est l’industrie manufacturière (-40%)”.
Responsable de l’émission de 1,7 million de tonnes de CO2 chaque année dans le monde, l’industrie textile est un poids lourd mondial et, pour ce qui concerne l’Europe, l’habillement “la quatrième catégorie de consommation ayant le plus d'impact sur l'environnement, après l'alimentation, le logement et les transports”. D’après un rapport du WWF sur l’industrie de l’habillement et des textiles, le rythme de croissance de la demande d’habillement s’intensifie très fort. De 62 millions de tonnes en 2015, elle devrait atteindre 102 millions de tonnes en 2030.
C’est ainsi que, si nous raisonnons à l’échelle mondiale, ce qui est le seul raisonnement acceptable dans le cadre d’une diminution de nos émissions de GES, nous n’avons fait que déplacer le problème. Pire, nous avons exporté nos besoins industriels dans des pays dont la production d’énergie libère souvent beaucoup plus de carbone que la nôtre. C’est pourquoi si une consommation de textiles plus raisonnée est l’un des leviers à mettre en action pour réduire notre empreinte carbone, la réindustrialisation en est un autre.
Diminution des émissions de GES (en %) entre 1990 et 2015 et contributions respectives des différents secteurs industriels / source : Union des industries textiles
"La relocalisation de seulement 25% de la production textile en France réduirait l’empreinte carbone de 3,5 millions de tonnes CO2 eq., soit l’empreinte carbone de Paris pendant deux mois"
Relocaliser l’industrie textile en France ?
Il est évidemment plus simple de dire “relocalisons en France” que de le faire. Néanmoins, considérons les avantages de la relocalisation d’une partie de l’industrie textile française. Outre les effets bénéfiques sur l’emploi local, les bénéfices écologiques sont tout à fait notables. Selon les douanes françaises, près de 90% des textiles que nous utilisons en France sont importés. La majorité des importations provient d’Asie, particulièrement pour ce qui est de la production de fibre, la filature, le tissage, le tricotage et l’ennoblissement. “En 2019, un kg de textile consommé en France (dans un vêtement ou linge de maison grand public) génère 54 kg d’équivalent CO2 (avec une production importée à 95,7%)*.” A titre de comparaison, un kg de textile produit en France ne génère que 27,7 kg de CO2 eq. soit moitié moins. Relocaliser la production de textile en France permettrait de diminuer de moitié l’empreinte carbone du secteur textile. L’Union des Industries du Textile (UIT) calcule, pour sa part, que la relocalisation de seulement 25% de la production textile en France réduirait l’empreinte carbone de 3,5 millions de tonnes CO2 eq., soit l’empreinte carbone de Paris pendant deux mois.
Par ailleurs, les invendus génèrent aussi une forte pollution puisque pour un kg de textile consommé, on en produit 1,37 kg. Une production de textile plus locale permettrait de réduire le surplus en produisant les textiles en fonction de la demande plutôt que de développer l’offre.
Que préconise la loi Agec pour le secteur textile ?
Entrée en vigueur au 1er janvier 2022, la loi Agec antigaspillage oblige le réemploi, la réutilisation ou le recyclage des produits non alimentaires invendus. Elle impose également que les consommateurs soient clairement informés de certaines caractéristiques environnementales des produits qu’ils achètent.
C’est ainsi que, dès le 1er janvier 2023, tout producteur et importateur au chiffre d’affaires annuel supérieur à 50 M€ et distribuant plus de 25 000 unités par an devra informer les consommateurs sur un support dématérialisé de la traçabilité géographique des 3 grandes étapes de fabrication (tissage, teinture, assemblage/finition) et les avertir du risque de rejet de fibres micro-plastiques au cours du lavage, pour les tissus principalement synthétiques.
En effet, selon Greenpeace qui s'appuie sur une étude de l'université de Plymouth, “laver 6 kilos de linge en machine libérerait 500 000 microfibres de polyester et 700 000 d’acrylique. Ces micro-plastiques terminent généralement dans les océans et représentent 15 % et 31 % des 9,5 millions de tonnes de plastique déversées chaque année dans les océans*”.
Outre cela, d’ici à 2030, des mesures seront prises pour l’ensemble du cycle de vie des produits textiles :
- Une quantité minimale de fibres recyclées dans la composition des textiles, visant à rendre ces derniers plus résistants et plus faciles à réparer et à recycler ;
- une information plus précise sur les textiles et un passeport numérique du produit ;
- des contrôles stricts en matière d'éco blanchiment (greenwashing) pour protéger les consommateurs.
"80% des consommateurs français affirment vouloir prendre en compte l’impact environnemental de leurs achats, tout en estimant disposer de peu d’informations fiables"
Une nouvelle législation qui s’appuie sur la responsabilité des consommateurs
La loi Agec est en définitive contraignante pour les entreprises vis-à-vis de leurs clients et consommateurs, c’est-à-dire qu’elle s’appuie massivement sur l’image de marque des sociétés et leur engagement en matière de RSE, attendu que, d’après une étude menée en 2019 par Ipsos MORI, 80% des consommateurs français affirment vouloir prendre en compte l’impact environnemental de leurs achats, tout en estimant disposer de peu d’informations fiables. La nouvelle législation permettra ainsi à chacun d’orienter ses achats en conscience, ce qui devrait être favorable aux produits textiles fabriqués en France.
Une relocalisation de l’industrie textile assurerait non seulement une reconquête de notre souveraineté (France Industrie fait remarquer que lors de la pandémie de Covid, masques et blouses nous ont cruellement fait défaut puisqu’ils ne sont plus fabriqués en France), mais également la création d’emplois et last but not least de largement diminuer notre empreinte carbone.
Et puisqu’il n’est pas question de céder aux sirènes du greenwashing dans cette stratégie à triple effet gagnant, la loi Agec vient également encadrer de manière stricte l’utilisation d’expressions telles que “neutre en carbone” ou “bon pour la planète”. Pour notre part, de même que nous refusons de parler de “compensation carbone”, qui sonne le plus souvent comme un droit à polluer, nous mettons en garde contre l’utilisation de l’expression “neutre en carbone”, la neutralité carbone ne pouvant s’atteindre qu’à l’échelle mondiale, ou à défaut d’un continent, d’un Etat, en aucun cas d’une entreprise. Ce qui n’empêche pas chacun d’agir pour la restauration des écosystèmes abîmés par deux siècles d’industrialisation et pour la gestion et le développement des puits de carbone naturels que sont les forêts.
Amarildine et Imbretex, partenaires d’EcoTree
La maison Amarildine, créatrice de robes de mariées, a décidé d'intégrer ses convictions pour l’environnement et la biodiversité dans son business model. C’est ainsi qu’elle offre un arbre via une carte cadeau en bois à chaque cliente, afin de les sensibiliser à leur empreinte carbone et aux actions qu’il est possible de mettre en place pour contribuer à la création de puits de carbone naturels.
Le groupe Imbretex, distributeur de textile promotionnel, a décidé, quant à lui de dématérialiser ses 2000 à 2500 bons de livraison quotidiens, afin de réduire son empreinte carbone. L’argent que cela fait économiser au groupe lui permet de financer la plantation et l’entretien d’arbres dans nos forêts durablement gérées.
C’est ainsi que nous proposons aux entreprises de contribuer à la préservation de la biodiversité et la reconstitution du tissu du vivant via des Solutions Fondées sur la Nature. Nous proposons différentes actions de reconstitution de la biodiversité sur-mesure, n’hésitez pas à nous contacter.
Images : ©France Industrie
* https://portals.iucn.org/library/efiles/documents/2017-002-Fr.pdf