28 août 2020

Les arbres sont-ils intelligents ?

Selon Francis Hallé, les arbres sont intelligents, et s’ils ne répondent pas exactement à la définition de l’intelligence, c’est qu’elle a été forgée par les hommes.

Les arbres sont-ils intelligents ?

A cette question qui divise la communauté scientifique depuis une décennie, Francis Hallé répond par l’affirmative. Oui, d’après lui les arbres sont intelligents, et s’ils ne répondent pas exactement à la définition de l’intelligence, c’est qu’elle a précisément été forgée par les hommes. Certes, depuis une quinzaine d’années, d’incroyables capacités ont été découvertes aux arbres et aux plantes, mais peut-on pour autant leur attribuer une intelligence ? Le débat est ouvert.

Oui, les arbres sont intelligents

Le botaniste, biologiste et dendrologue Francis Hallé assume l’idée que les arbres soient intelligents, et il en donne des preuves. La timidité des couronnes des arbres, qu’il a lui-même nommée, en serait une. Bien que l’on ne l’explique pas encore scientifiquement, certains arbres de la même espèce font en sorte que leurs cimes ne se touchent pas, afin de ne pas se gêner, laissant entre elles une “fente de timidité”. 
Certains scientifiques pensent que les arbres feraient du bruit en poussant, et qu’ils reconnaîtraient au bruit qu’ils font leurs congénères de la même espèce poussant à côté d’eux. Ce pourrait être une explication à cette “timidité”, et cela signifie qu’ils ont une certaine “conscience” de ce qui les entoure.
Le hêtre, quant à lui, sait distinguer ses “petits” de ceux qui ne sont pas issus des graines qu’il a produites. Il n’entre ainsi jamais en compétition avec ses propres rejetons, et fait en sorte que ses racines s’en écartent pour les laisser croître, et que son essence se reproduise. 
Le cyprès, pour sa part, est capable de relâcher dans l’atmosphère les combustibles qu’il contient dès que la température environnante atteint les 60°C, et les cyprès environnant n’ont même pas besoin que cette forte chaleur les atteigne pour suivre son exemple. Ainsi, réduits à des sacs d’eau, ils ne peuvent plus brûler. 
Voici certains exemples que prend le botaniste pour soutenir la thèse de l’intelligence des arbres, et il faut avouer qu’une si rare adaptation aux circonstances est le signe d’une forme d’intelligence. Que font d’autre les animaux et les humains que nous sommes sinon s’adapter aux circonstances pour survivre ? 
Chacun combat avec les armes qu’il a, dans la grande lutte pour la survie qu’est notre condition à tous sur cette Terre. Francis Hallé nous fait remarquer que l’arbre, lui, n’a aucun organe vital, contrairement aux animaux que nous sommes. Ainsi peut-il être attaqué par les hommes, les animaux, les parasites sans en mourir. C’est sa manière de résister, puisqu’il ne peut ni se défendre activement, ni se déplacer.
Est-ce suffisant pour dire que les arbres sont intelligents ? Ils sont en tout cas dotés d’une forme de mémoire (cela a été démontré sur les plantes par le botaniste), d’une forme de conscience d’eux-mêmes et de leurs congénères, ainsi que d’une capacité de résistance et de résilience. Mais ont-ils la faculté de connaître et de comprendre ?

Au commencement était l’arbre

La question que l’on se pose est-elle biaisée ? Et si, à la manière des Chinois, nous inversions le regard. Les arbres ne nous connaissent-ils pas dès le commencement, et ne sont-ils pas la condition sine qua non de notre existence et de notre possible intelligence ? Le monde, avance le philosophe Emanuele Coccia, est tout d’abord une réalité végétale : c’est seulement parce qu’il est un jardin que nous pouvons y vivre.
Le monde est donc conçu par les plantes et les arbres, qui n’ont besoin que de la lumière du soleil, de l’eau, de l’air et de la terre pour exister et se multiplier. Sans le monde végétal, nous n’existerions pas. Est-ce parce que nous nous y sommes adaptés que nous sommes intelligents, ou est-ce parce que les conditions étaient propices à la vie animale et humaine que nous avons pu nous y développer ? Et si notre intelligence était à relativiser, dans le sens où nous n’avons rien inventé, nous étant uniquement servi de ce qui nous préexistait, tandis que le règne végétal a formé le monde ? Aussi les vrais jardiniers, pour le philosophe italien, sont-ils les plantes, qui font ce monde et le maintiennent en vie. Nous serions donc l’objet de leur action. “Les plantes ne sont pas le paysage, elles sont les premiers paysagistes.”

Les arbres ont un sens de la perception du monde

Plusieurs scientifiques ont démontré que les arbres percevaient la gravité, le vent et leur position, qu’ils étaient capables de modifier. Ils ne feraient donc pas que subir les lois physiques. L’Inra de Clermont-Ferrand a ainsi démontré qu’une plante tout entièrement baignée dans la lumière, après avoir tâtonné, finit par se redresser, prouvant qu’elle ressent la gravité, alors qu’elle aurait pu partir dans n’importe quelle direction.
Dans le même lieu, a été démontré que les végétaux avaient conscience de leur propre corps dans l’espace. Ainsi, précise l’un des scientifiques, “l'arbre perçoit s'il est bien rectiligne ou courbé et a la capacité de se rectifier et de contrôler son équilibre”. 
Mais plus encore, on a prouvé que l’arbre possédait le sens du toucher. Les plantes perçoivent le vent et son intensité. Ainsi un arbre confronté à un vent inhabituel réduira-t-il sa croissance en hauteur afin d’augmenter son diamètre et de développer plus de racines, pour mieux se tenir.
Les jeunes peupliers, eux, ont des réactions électriques du type de l’influx nerveux que l’on détecte chez les animaux, lorsqu’ils sont fléchis par le vent, et gardent ces informations en mémoire jusqu’à une année. 

L’incroyable succès de "La vie secrète des arbres"

C’est le livre de Peter Wohlleben, La vie secrète des arbres, qui a permis de propager auprès du grand public ces notions d’intelligence des arbres. Bien qu’il récuse l’anthropomorphisme du garde forestier allemand, Francis Hallé abonde dans le sens de ses théories. Et si le moindre mal qu’il ait causé est d’avoir porté à l’attention du plus grand nombre les incroyables mécanismes mis en place par les arbres pour leur survie et la nôtre, en publiant ce best-seller, traduit en plus de 40 langues, vendu à plus d’un million d’exemplaires en France et adapté au cinéma, c’est une peccadille dont il n’est pas difficile de l’absoudre. 
Les végétaux commencent enfin à tenir la place qu’ils méritent dans nos consciences d’hommes civilisés, dotés de l’intelligence que nous avons décrite et définie. Sommes-nous résolument capables de contredire Aristote qui estimait que les plantes n’étaient capables que de végéter ? 
Il semble bien que l’arbre soit parti pour nous faire tâter de son intelligence. Laquelle a bien plus de chances de nous sauver que l’intelligence dite artificielle, calquée sur la nôtre. 
 

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