Les arbres d’Homère

La pomme d’or et la guerre de Troie

Cela commence par une histoire de jalousie entre déesses. La déesse de la Discorde n’ayant pas été conviée parmi les autres dieux lors d’un mariage important, elle se venge en y jetant une pomme d’or dédiée « à la plus belle ». Les trois plus belles déesses se cherchant un juge, Zeus les envoie voir Pâris, le fils du roi de Troie, Priam, qui gardait alors les troupeaux. Ne sachant qui désigner d’Héra, de Pallas Athéna ou d’Aphrodite, cette dernière lui représenta qu’elle lui offrirait la plus belle femme du monde s’il la désignait – ce qu’il fit.

Hélène était femme de Ménélas, roi de Sparte, chez qui Aphrodite mena Pâris. Le roi et la reine l’ayant reçu dans le plus grand respect de toutes les lois de l’hospitalité, Pâris profite de l’absence de Ménélas pour enlever sa femme. Le roi cocu rassemble alors tous les chefs grecs – parmi lesquels Ulysse. C’est donc pour venger leur amour-propre blessé qu’Héra et Athéna déchaînent la furie des Grecs contre les Troyens qui rendent leur culte à Aphrodite et Apollon.

Ulysse revient…

Lorsqu’après avoir vaincu Troie et passé les embûches semées par la déesse Aphrodite sur son chemin de retour, Ulysse revient à Ithaque, sa femme ne le reconnaît pas et se méfie de cet homme. Las d’essayer de lui prouver qui il est, il demande un lit et Pénélope, sa femme, tente une ruse. Elle demande que soit déplacé le lit qu’il a lui-même construit de ses mains, or « il expose avec force détails comment il a bâti leur lit en utilisant pour socle la base du tronc d’un olivier, cœur d’une chambre construite autour de l’arbre. » C’est ce détail qui révèle à Pénélope qu’il s’agit bien de son mari. Le lit a été construit autour d’un arbre, un olivier, dont la symbolique est riche. Cet arbre représente la récompense, la purification, la force, la paix, la victoire et la fécondité, tout ce qu’a mérité Ulysse après tant d’épreuves. En outre, chez les Grecs, l’arbre était dédié à Athéna.

…mais on ne le reconnaît pas

Mais plus tard, c’est son père Laërte qui ne reconnaît pas son fils Ulysse. C’est dans le jardin soigné, que Laërte continue d’entretenir avec de grands soins, que l’un et l’autre se rencontrent. Pour se faire reconnaître, Ulysse énumère tous les arbres fruitiers que son père lui a donnés : « j’étais encore enfant, je te suivais et t’en demandais tel ou tel ; de l’un à l’autre nous allions, tu me disais leur nom et m’en parlais. Tu me donnas treize poiriers et dix pommiers et quarante figuiers ; de même, tu me désignas cinquante rangs de ceps dont chacun était vendangeable. » Et Laërte reconnaît son fils à qui il a transmis ses biens et son savoir. La symbolique de ces arbres est importante : le figuier et la vigne sont nutritifs par excellence, à la fois porteurs de fruits et suggérant par leur suc le liquide nourricier primordial, la sève blanche du figuier assimilée au lait maternel ou au sperme, symbole de fécondité. Le vin est assimilé, par son habituelle couleur rouge au « sang » de la vigne. Pomme, figue et vin sont ainsi promesses de vie longue et investis de pouvoirs liés à l’abondance, l’initiation et l’immortalité.

Comme l’écrit Sylvain Tesson, « ce qui est planté ne ment pas. »