15 févr. 2019

Arbres mythologiques chez Ovide et Mircea Eliade

Ovide, l'un des plus grands poètes latins, a fait entrer mythes et légendes dans l'Histoire avec ses "Métamorphoses" et Mircea Eliade fut l'un des plus grands mythologues

Arbres mythologiques chez Ovide et Mircea Eliade

Ovide, l'un des plus grands poètes latins, a fait entrer mythes et légendes dans l'Histoire avec ses "Métamorphoses" et Mircea Eliade fut l'un des plus grands mythologues du vingtième siècle. A deux mille ans de distance, l'un et l'autre se sont passionnés pour les arbres.

L’amandier de Phyllis

L’amandier est appelé le veilleur, car c’est lui qui annonce le printemps. Symbole de fragilité et de renaissance, il est le premier à fleurir et sa fleur s’expose au gel. Les Grecs racontent que Phyllis, fille du roi de Thrace se donna à Démophon, fils de Thésée et de Phèdre, de retour de la guerre de Troie. Celui-ci lui ayant juré de revenir pour l’épouser, part pour Athènes et l’oublie. Ayant été l’attendre neuf fois, Phyllis comprit qu’il ne reviendrait pas et se pendit à un arbre, et les bois pleurèrent sur son tombeau, raconte Ovide. Les dieux la transformèrent en amandier stérile qui ne fleurirait que lorsque Démophon reviendrait. Alors, Démophon revenu, enlaçant l’arbre, celui-ci fleurit en plein hiver, malgré le gel. C’est ce qui explique sa floraison précoce. Les amandes seraient les larmes de la princesse morte.

Amours interdites

C’est encore Ovide qui a développé le mythe du mûrier, symbole des amours interdites de Pyrame et Thisbé, qui ressemblent à celles de Roméo et Juliette, sauf que Pyrame et Thisbé sont frère et sœur. Ces deux Babyloniens s’aiment malgré l’interdiction paternelle et se retrouvent hors de la ville, sous un mûrier blanc. L’un croyant que l’autre a été tuée par une lionne se suicide et son sang éclabousse les mûres blanches où celle-ci, revenue, se tuera à son tour. « Et toi, arbre fatal, qui de ton ombre couvres le corps de Pyrame, et vas bientôt couvrir le mien, conserve l'empreinte de notre sang ! Porte désormais des fruits symboles de douleur et de larmes, sanglant témoignage du double sacrifice de deux amants ! », écrit le poète latin.

La mûre, depuis, symbolise les différentes phases de l'amour jusqu'à la passion dévastatrice puisque le fruit passe du blanc au rouge, puis au noir, lors des phases du mûrissement. Une autre légende raconte qu’elle se serait suicidée la première, se sachant enceinte. C’est cette légende qui a donné à Claude Louis-Combet la trame de son roman Blesse, ronce noire.

Orphée et les Ménades

Avec la vigne, le lierre est l’un des attributs de Bacchus et de ses suivantes, les Ménades. Parfois, tressé en couronne, il ceint leur tête. On prête au lierre en décoction les vertus d’atténuer les effets de l’ivresse.

Les Ménades en furie déchireront Orphée dont les chants entraînent les hôtes des forêts, les forêts elles-mêmes, ainsi que les rochers. Ce sont des pierres, des branches arrachées et des masses de terre qu’elles lui lancent au visage, pour commencer. Puis, elles ramassent les outils des agriculteurs qu’elles ont mis en fuite, pour lacérer le visage et le corps de celui qui charme les forêts.

« Chantre divin, les oiseaux instruits par tes chants, les monstres des déserts, les rochers du Rhodope, les bois qui te suivaient, tout pleure ta mort. Les arbres en deuil se dépouillent de leur feuillage », chante Ovide. Bacchus, pris de regret, et voulant venger la mort de celui qui chantait ses mystères sacrés, « soudain dans les forêts, il enchaîne les pas des Ménades sanguinaires. Leurs pieds s'allongent en racines tortueuses, et se plongent dans la terre, plus ou moins profondément, suivant le degré de fureur qui les anima dans leur crime […] Elles cherchent où sont leurs pieds, et leurs doigts, et leurs ongles : déjà leurs jambes ne sont plus que des tiges. Dans leur douleur, elles veulent se frapper, et ne frappent qu'un tronc d'arbre. Bientôt l'écorce s'élève et couvre leur sein. Leurs bras verdissent et s'étendent; on les prendrait pour des rameaux; et ce ne serait pas se méprendre. »

Mythologie chez Mircea Eliade

Mircea Eliade évoque un culte des arbres, liés aux dieux Attis et Cybèle, en Grèce antique. Une confrérie dite des « dendrophores » (étymologiquement « porteurs d'arbres ») « amenait de la forêt un pin coupé (arbor intrat). Le tronc était enveloppé de bandelettes, comme un cadavre, et au milieu était attachée une image d'Attis. L'arbre représentait le dieu mort. » Ces processions avaient lieu lors de fêtes à l'équinoxe de printemps, du 15 au 23 mars.

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